22 juillet 2007

Quinzaine "East Coast"

Il fallait bien qu'un jour New York, Boston ou même Chicago aient droit de réponse sur Los Angeles, San Francisco et les îles américaines du Pacifique...

Alors voici lancée, presqu'un an jour pour jour après la Quinzaine "West Coast classics", la Quinzaine "East Coast".

Qu'écrit-on au pays du levant américain ? Pourquoi dit-on que New York est la plus européenne des villes américaines ? Que se passe-t-il à Brooklyn ? Septembre 2001, est-ce une date particulièrement littéraire ?

Parmi les auteurs de « l'East », on pourrait citer John Dos Passos, J.D. Salinger, Paul Morand, Sylvia Plath, Truman Capote, Francis Scott Fitzgerald, Siri Hustvedt, Jean-Paul Sartre, Jack Kerouac, Walt Whitman, Georges Perec, Louis-Ferdinand Céline, Blaise Cendrars ou encore Jerome Charyn... En connaissez-vous d'autres ?

Du 22 juillet au 5 août 2007,
participez vous aussi à la Quinzaine "East Coast" sur le Blog à Lire !


Et voici les lieux du crime :

NEW YORK (et Manhattan, Brooklyn, Harlem)
Paul AUSTER, Brooklyn Follies
James BALDWIN, Harlem Quartet et ... Chassés de la lumière...
CATEL & BOCQUET, Kiki de Montparnasse
Simone DE BEAUVOIR, Lettres à Nelson Algren
Don DELILLO, Cosmopolis
Dashiell HAMMETT, L'Introuvable
Ernest HEMINGWAY, "50.000 dollars"
Chester HIMES, Imbroglio negro
Groucho MARX, Mémoires d'un amant lamentable
Amélie NOTHOMB, Biographie de la faim
SAPPHIRE, Push
SETH (alias Gregory Gallant), La Vie est belle, malgré tout


BOSTON
Lois LOWRY, Anastasia avec conviction, Anastasia, demande à ton psy ! et Anastasia connaît la réponse


WASHINGTON
James BALDWIN, ... Chassés de la lumière...
Simone DE BEAUVOIR, Lettres à Nelson Algren


CHICAGO
Simone DE BEAUVOIR, Lettres à Nelson Algren
Kevin HUIZENGA, Ganges, 1 et Malédictions
Chris WARE, Jimmy Corrigan, the smartest kid on earth

21 juillet 2007

Brooklyn Follies

« Pourquoi je m'attarde sur ces détails sans importance ? Parce que la véracité de l'histoire se trouve dans les détails et que je n'ai pas le choix : il me faut la raconter exactement telle qu'elle s'est passée. Si nous n'avions pas pris cette décision de quitter l'autoroute à Brattleboro et de suivre de bout de notre nez jusqu'à la route 30, un grand nombre des événements rapportés dans ce livre n'auraient jamais eu lieu. Je pense tout spécialement à Tom en disant cela. Lucy et moi, nous en avons profité aussi mais pour Tom, héros longanime de ces Brooklyn Follies, ce fut sans doute la décision la plus importante de sa vie. »

... Eh non, ce ne pas là le monologue de Flash McQueen dans Cars, mais celui de Nathan Glass, narrateur du dernier roman de Paul AUSTER sorti en France en format de poche.

Nathan est un New Yorkais de soixante ans, fraîchement retraité d'une compagnie d'assurances vie à Manhattan. C'est un peu le man Nathan, le Man-Hattan, l'homme lambda de Manhattan. Il a durant ces derniers mois subi l'annonce d'un divorce puis d'un cancer. Il se remet de son cancer, vend sa maison, achète un appartement à Brooklyn et retombe par hasard sur Tom, son neveu lettreux.

Nathan est le narrateur de son histoire, mais il nous dit que c'est Tom qui en est le personnage principal. A défaut d'être un "héros" en dehors de ce "récit d'une vie de retraité", Tom est un personnage vaguement attachant... ou vaguement chiant, c'est selon. Aussi, je suis bien content au moment où je me rends compte que Nathan digresse, et s'éloigne de Tom.

Dix ans après les scenarii de Smoke et Brooklyn boogie, Paul Auster signe ici un roman d'apparence simple, au message simple, à la psychologie simple. On est loin des constructions complexes de romancier expérimental, façon Cité de verre. Au départ, l'histoire de Nathan ne paye pas de mine, et le quotidien d'un néo-retraité n'est pas un sujet a priori des plus passionnants. Mais Auster s'y connaît et nous connaît, et on n'a pas lu 50 pages qu'on est accro à Brooklyn Follies comme à un bon polar. Il se dégage à la lecture de ce bouquin l'impression que l'auteur a tout prévu, tout anticipé pour nous prendre au piège, pour forcer notre respect. Echos, confirmation, effets de surprise : l'intrigue n'est pas linéaire mais en forme de spirale. On ne croit pas longtemps à la petite musique du hasard, et lorsque Nathan abat ses cartes, lorsque Auster avance ses pièces, on les suit tous deux sur la diagonale de la folie humaine.

Des follies qui n'ont rien d'extravagant, de simples faits banals dans des vies banales mais qui, mis bout à bout, font fortement sens. Nathan reconstruit ainsi une gallerie de portraits familiaux, et Paul Auster anticipe le traumatisme du 11 septembre 2001. C'est le jour improbable où 2 973 vies banales ont cessé.

Un "road novel", une éducation sentimentale, un feuilleton américain, une hagiographie, des histoires d'amour ou de simple attirance, un roman de société, une topographie de Brooklyn. Brooklyn follies c'est tout ça.


364 pages, coll. Babel - 8,50 €

14 juillet 2007

(BD) Kiki de Montparnasse

C'est une B.D. publiée dans la collection Casterman écritures par CATEL & BOCQUET et ça raconte la vie et éventuellement les œuvres d'une des muses du Surréalisme.

Kiki naît Alice Prin en 1901 à Châtillon-sur-Seine. Elle n'est pas reconnue par son père, qui était probablement un fils de... famille respectable. Sa mère la laisse à la garde de sa grand-mère et part à Paris pour devenir linotypiste. Elle vit une enfance chahuteuse et débridée sous les yeux d'une aïeule libérale. Puis elle monte à son tour à Paris ; sa mère souhaite qu'elle y complète son instruction et — pourquoi pas — qu'elle devienne linotypiste à son tour.

Mais pour vivre et payer son école, Alice doit aussi travailler. Or ses premiers essais ne sont pas concluants : trop insolente, elle ne supporte pas longtemps ses patrons. Alors pour ne pas avouer à sa mère qu'elle vient de se faire virer d'une boulangerie, Alice accepte la proposition d'un vieil homme et se rend chez lui pour... poser nue, en tout bien tout honneur. Mais la mère d'Alice débarque en furie chez le sculpteur amateur, dénoncé par son voisinage comme un vieux dégueulasse. Alice erre, sans toit ni rien dans l'estomac, et finit par se prostituer. Merci maman, merci papa.

Avec une amie qui partage son sort, elle court les auditions pour les revues et autres spectacles. Mais c'est la misère. Si bien qu'un soir d'hiver où il fait froid, les deux jeunes femmes vont s'offrir à un jeune artiste sans le sou en échange de son toit pour la nuit. Et le jeune artiste en question, c'est Chaïm Soutine, le tourmenté. Et dans son entourage, il y a Amedeo Modigliani, Moïse Kisling, Fujita Tsuguharu, puis Henri-Pierre Roché, Tristan Tzara, Pablo Picasso, Robert Desnos, Jean Cocteau... et tant d'autres mais surtout, surtout, le photographe d'origine américaine Man Ray.

Alice, rebaptisée Aliki puis Kiki par l'autre "Kiki" de Montparnasse, Moïse Kisling, va successivement poser pour tous ces jeunes artistes à qui l'art moderne doit beaucoup d'œuvres majeures dans les années 20 et 30. Elle devient une véritable muse pour Man Ray, qui l'immortalise dans les photos en noir et blanc qui représentent encore aujourd'hui le mouvement Surréaliste.

La vie de Kiki est dès lors un parcours artistique, dont elle n'est pas simplement un outil voire une inspiratrice, mais véritablement l'une des actrices majeures. Car c'est autant sinon plus le caractère de Kiki que son corps, que les peintres, sculpteurs et photographe(s) saisissent au passage. On dit de ce genre de personnes qu'elle sont un roman à elles seules ; ici, Kiki incarne mieux que personne tout une époque artistique.

Cette B.D. se lit très bien et les auteurs ont indéniablement mis la main sur une personnalité qui mérite ce bel hommage. Le dessin, en noir et blanc, est agréable et efficace. Les visages espiègles et la peinture d'une société sans merci rappelleront Marjane Satrapi et son Persepolis. CATEL & BOCQUET ont un peu plus de mal à prendre leur distance avec certains artistes de l'époque lorsqu'ils les représentent : chaque portrait de Cocteau, par exemple, ressemble à une photo posée de trois quart, avec permanente et regard mystérieux de circonstance. Je ne parle même pas de Picasso. Man Ray, par contre, très présent dans la vie de Kiki et par conséquent dans ce volume, est un peu plus "quotidien" et un peu moins "demi-dieu" que Desnos ou Modigliani...

Les références des auteurs sont nombreuses, comme ils ont tenu à nous le faire savoir par une bibliographie serrée de trois pages en fin de volume. Le choix des titres, lorsqu'on s'y penche, paraît plus aléatoire que réfléchi, mais bon. On lira/verra aussi des clins d'œil appuyés au cinéma, avec par exemple un copier-coller de Cabaret et de la fameuse chorégraphie assise de Liza Minelli. Les auteurs m'ont sérieusement intrigué en situant Les Dix commandements de Cecil B. Demille en 1923... alors que les acteurs principaux, souvenez-vous en, sont Charlton Heston (né en 1923) en Moïse et Yul Brynner (1915-1985) en Pharaon. Bref, le film en question, un monument du peplum hollywoodien, date de 1952, donc Kiki de Montparnasse n'a pas pu passer des auditions pour y figurer en 1923... sauf si Cecil B. Demille a fait deux films avec le même titre, le premier étant un muet de 1923. Il fallait le savoir, et merci Wikipedia pour la confirmation.

Je ne trahirai pas l'intérêt que vous trouverez à lire cette B.D. en vous disant comment se termine le parcours de Kiki de Montparnasse. Si comme moi vous trouvez l'entrée en matière un peu lente, les détails sur l'enfance franchement inintéressants, vous regretterez simplement que Catel & Bocquet passent un coup de gomme de plusieurs années sur l'époque où Kiki redevient une passante anonyme de Paris.

Quoi qu'il en soit voilà un livre qui se lit d'une traite, et un personnage que je suis heureux d'avoir découvert.


374 pages, coll. Casterman écritures - offert

13 juillet 2007

Mémoires d'un amant lamentable

« Celia, le dernier numéro de mon petit calepin. J'avais déjà investi un demi-dollar en téléphone. Je me souvenais très bien de Celia, une petite avec des verres de contact, la fesse plate mais suffisamment de poitrine pour remplir deux soutiens-gorge. Plutôt mignonne, mais, malheureusement, intellectuelle. Elle habitait Greenwich Village et ne se séparait jamais, même pour aller au petit endroit, d'un bouquin de Spinoza.
Ce dernier numéro ne m'emballait qu'à moitié, mais, si vous vous êtes déjà trouvé seul dans une chambre d'hôtel, une pluie fine et glaciale battant les vitres, tandis que, dehors, les klaxons des taxis évoquent pour vous des couples énamourés se ruant vers de larges divans, vous savez qu'il ne vous reste comme choix que de vous précipiter du haut de l'Empire State Building, ou dans les bras de Celia. »


Groucho MARX vieillissant publie ce livre de fausses confessions ou de vraies blagues en 1963. Il n'y a pas grand chose à en dire. C'est une série de chapitres courts illustrant un seul et même credo : il faut s'amuser de tout, quel qu'en soit le prix.

Les amateurs de Woody Allen reconnaîtront ici des traits communs. Beaucoup de bons mots, sous la plume de Groucho, viennent de situations amoureuses ou de personnages particulièrement cocasses. Ça se lit avec délectation et sans pouvoir se résumer. C'est un répertoire de citations rempli à ras bord.

Ce livre m'a fait éclater de rire des dizaines de fois, et ça n'est certainement pas une qualité négligeable, même pour les très studieux lecteurs de ce blog. N'est-ce pas ?


216 pages, coll. Points-Virgule - 3 €

05 juillet 2007

(BD) Snoopy and the Red Baron

It's a red comic book by Charles M. SCHULZ, with a hard cover, green or yellow pages and a very famous flying dog.


... to be continued on SIGH !

04 juillet 2007

(BD) Les Chipies

Les Chipies est la troisième et dernière compilation des éditions Hachette dont je veux vous parler. Elle regroupe des strips de Charles M. SCHULZ datant entre 1958 et 1974, et a été publiée en 1975 en grand format et en 46 pages dans la collection "Bande verte", avec une colorisation tardive de Henri Filippini.

Voilà pour l'intro.

Je vous dirais ensuite, comme pour les deux précédentes, que cette BD est assez étrangement colorisée, mais qu'on s'y fait peu ou prou. Que la sélection de strips est efficace et qu'elle est certainement l'œuvre d'assez bons connaisseurs des Peanuts. Le trait est varié puisque que les strips les plus anciens et les plus récents sont espacés de plus de 25 ans, soit la moitié de la période pendant laquelle Schulz a produit son œuvre (de 1950 à 2000).

Même si Lucy occupe seule la couverture, et qu'elle mérite amplement le titre de "chipie", d'autres petites graines (apéritives) de femmes prennent aussi le relais. Violet est ici la concurrente la plus sérieuse de Lucy, et ne se défait pas lorsqu'il s'agit de crier pour imposer son point de vue. Les garçons sont tour à tour les spectateurs ou les innocentes victimes de Lucy, Sally, Violet, Patty. Linus et Charlie Brown sont en première ligne pour se faire incendier, bousculer, chahuter. Schroeder, dont Lucy est amoureuse, a l'énorme avantage de n'être pas bavard, tout absorbé qu'il est dans l'œuvre de Beethoven. Snoopy, enfin, subit quelques déconvenues assez sévères face à Lucy et Violet. Frieda est absente de ce volume, pourtant on avait vu dans Miaou ! qu'elle pouvait être chipie elle aussi.

En conclusion, un travail très honnête de la part des éditions Hachette BD. En 1975, il était rare de trouver les Peanuts sous leur titre original en France. Et puis le choix des strips dans ces trois volumes est bon. Le seul bémol va à la colorisation de Henri Filippini : elle n'est pas dénuée d'intérêt, mais elle a quand même bien vieilli... Je ne suis pas sûr que les couleurs qu'afflige Dargaud aux albums de "Snoopy" ces dernières années vieillissent mieux...


46 pages, coll. B.D. Hachette "bande verte" - env. 3 € en occasion

(BD) Les Amours de Snoopy

Publié chez BD Hachette en 1974, voici une BD de 46 pages qui s'apparente aux Snoopy de format classique publié chez Dargaud, et qu'on trouve dans les bacs de BD destinée aux jeunes lecteurs.

Ce n'est pas un album à proprement parler, mais une compilation, comme le titre précédent. Les strips originaux datent de 1967 à 1973 et ont été colorisés après coup par Henri Filippini. Les couleurs sont plus académiques que dans Les Malheurs de Charlie Brown, même si, même si... la niche de Snoopy n'arrive pas à se fixer sur la couleur qu'on lui connaît, Peppermint Patty se fait une nouvelle teinture à chaque page, comme Linus précédemment...

La première case du volume représente Snoopy de profil portant un drapeau où figure un gros cœur blanc sur fond rose. Cette image a été réutilisé avec d'autres choix de couleurs dans un volume récent paru chez Rivages poche, intitulé Les Amours des Peanuts. Mais comme je le signalais à l'époque, Rivages poche n'arrive pas à se limiter au thème fixé, sans doute parce que les responsables de leurs publications connaissent insuffisamment les Peanuts.

Les éditions Hachette, elles, s'en sortent ici fort bien et proposent à nouveau une compilation qui tient la route, avec un très bon choix de strips. Le trait est moins variant que dans Les Malheurs de Charlie Brown, parce que les strips originaux sont ici à peu près tous de la même période.

On verra ici en exclusivité mondiale Woodstock se trouvant une petite amie, qu'il présente à Snoopy comme si ce dernier était son père. Quelques pages plus tôt il lui offre un bouquet de fleurs pour la fête des mères. Snoopy écrit bien sûr des romans d'amour à l'eau de rose sur le toit de sa niche multicolore. Lucy, dont on sait à quel point elle voudrait séduire Schroeder, n'arrive qu'à obtenir un baiser de Snoopy. Peppermint Patty et Charlie Brown dissertent sur l'amour et sur la vie des adultes, assis au pied d'un grand arbre.


46 pages, coll. B.D. Hachette "bande verte" - env. 3 € en occasion

(BD) Les Malheurs de Charlie Brown

Publié chez BD Hachette en 1975, voici une BD de 46 pages au format classique et aux drôles de couleurs...

Est-ce dû à la participation d'un certain Henri Filippini, mais en effet ces strips des années 1959 à 1974 ont été colorisées après coup. Et dès la première page, les choix de couleurs étonnent et détonent. Ce ne sont pas les dégradés douteux de ces dernières années, réalisés avec Paint sous Windows 95, faut pas exagérer. Mais il règne ici une certaine anarchie : un coup, toute la case est rose fillette, la case d'après (qui représente la même situation) passe au bleu Superman, au vert Cendrillon ou au mauve Dracula.

Page 4, Linus est blond ; page 5 il est brun. Dommage que la petite fille rousse n'en profite pas pour faire son apparition sur fond marron ! Les caractères dans les bulles, eux aussi, prennent des couleurs au fil des pages, selon l'occasion : rose et gras, rouge et italique, les possibilités sont infinies...

Sur le fond, c'est une compilation de bonne facture et publiée sous le titre original. Contrairement aux éditions Rivages poche aujourd'hui, les éditions Hachette de l'époque tiennent bon autour du thème qu'ils s'imposent. Tous les strips représentent des variantes de l'éternel blues de Charlie Brown, ses causes (la petite fille rousse qui ignore son amour, les élucubrations de sa petite sœur Sally, l'ingratitude de Snoopy à son égard, ses visites chez "Lucy psychiatre", ses défaites cuisantes au baseball) et ses conséquences (sa résignation, ses soupirs sempiternels, les vexations supplémentaires que les autres Peanuts lui infligent pour le bousculer, et ses visites chez "Lucy psychiatre"... ).

Un album bleu et brun, à couverture verte et au titre jaune. Pour résumer.


46 pages, coll. B.D. Hachette "bande verte" - env. 3 € en occasion

02 juillet 2007

(BD) Jazz Maynard, tome 1

Pour réaliser ce premier volet d'une "trilogie barcelonaise", prévoyez une bonne dose de Corto Maltese, un souçon de Taxi Driver et de Matrix, et quelques jeunes filles à fortes poitrines de préférence dénudées...

C'est publié chez Dargaud et c'est une traduction de l'espagnol, si j'ai bien tout compris. Les traducteurs ne sont pas franchement à l'honneur dans les maisons d'édition de B.D. : il faut regarder attentivement ce qui est marqué dans les petites lignes au-dessus du copyright et là... "traducteur : Charles D'haene". Eh bien il méritait d'être cité, cet homme là : il fait du bon boulot.

Les deux auteurs de ce triptyque commençant bossent bien eux aussi : ils ont révisé leurs classiques du cinéma et du polar, ils ont une connaissance parfaite du prototype "mauvais garçon" ainsi que de celui qu'on pourrait appeler "blonde à (très) gros seins qui ne s'exprime que par onomatopées monosyllabiques et qui se fait toujours mettre à poil et taper dessus par les méchants".

L'atmosphère est rapidement posée : nous sommes à El Raval, quartier chaud d'une Barcelone contemporaine où règne depuis quelques temps une mafia locale comme on les aime. Notre héros éponyme répond au nom poétique et franchouillard de Jazz Maynard. Il revient des States, comme tout jazzman qui se respecte. Il a un don certain pour la trompette, et pour la castagne(-tte). Il est revenu sauver sa sœur des griffes du chef des méchants, qui la drogue et la met à poil et lui cogne dessus. "Home sweet home", ça veut dire "l'homme transpire sur l'homme"...

A ce stade de votre lecture, si vous êtes bien éveillé(e), vous avez compris quel personnage correspond à quel prototype. Nous pouvons donc continuer.

Les couleurs, les perspectives, la "mise en cases" sont très bien maîtrisées. Les traits des personnages principaux comme ceux des personnages secondaires tendent vers l'art de la caricature : des visages et des cheveux anguleux comme ceux de certains mangas, des biceps et des attributs très charnus comme ceux qu'on a vus chez Van Hamme, par exemple. Les plans s'enchaînent avec autant de savoir-faire que dans un film d'action à gros budget. La psychologie est sommaire et les incohérences frappantes.

Bref, on est ici en présence d'une B.D. d'auteurs qui se fait du gros cinéma, ou bien d'une B.D. à gros tirage qui se fait passer pour de la B.D. d'auteurs. Le scénario déçoit très vite et le manque total d'humour m'a amené à rire.

Jusqu'au moment où une bande de samouraï débarque sans crier gare dans la case barcelonaise, la prenant sans doute pour une auberge espagnole. Et là, tout d'un coup, il y a du Samourai Champloo, voire du Dragon Ball Z (que je connais mal, ne me frappez pas si je fais erreur) dans l'air. Leur arrivée soudaine sous le nez de Jazz Maynard, c'est un peu comme la rencontre fortuite de Jacques Villeret, fraîchement débarqué de l'espace, avec Le Glaude et sa soupe aux choux. Et ça vient à point nommé pour ranimer ma curiosité agonisante, me mettre l'eau à la bouche pour la suite de l'aventure, pour faire couler un peu de bave à la commissure de mes babines babyloniennes.


48 pages, éd. Dargaud - offert
La B.D. a son site web par ICI

01 juillet 2007

(BD) Win a few, lose a few, Charlie Bown

« Oh ! May I ask you a question ? If your dad is out of town, why can't you just stay at home with your mother ?
— I don't have a mother, Marcie ! »


Alors O U I, les Peanuts ça peut très bien être triste et grave. Et Marcy peut, comme elle le dit dans la case suivante, retourner chez elle et se peindre la langue en noir (traduction littérale) pour avoir posé la mauvaise question. Peppermint Patty n'aurait donc pas de maman. Je ne sais pas si vous allez vous en remettre, moi j'avoue que j'ai un peu de mal.

Mais bon. Ça ne l'empêche pas d'être la cacahuète la plus attachante du groupe à mon goût. Particulièrement du côté féminin. Côté petits hommes en germe, Linus recueille mon suffrage, particulièrement lorsque, patient, le cœur rempli d'espoir, il passe la nuit dans un carré de citrouilles en invoquant "the Great Pumpkin" dans une verve toute shakespearienne : « Oh, Great Pumpkin, why hast thou cast me off ? How long, oh, Great Pumpkin, wilt thou hide thyself from me ? Mine enemies reproach me all the day ! Bring thou me out of my distress ! » Et, dans la dernière case, la tête posée sur l'avant-bras, un simple « Rats ! »

... Je vais désormais écrire mon article au conditionnel. Vous allez comprendre pourquoi...

Dans ce tome vous verriez aussi Snoopy composer certains de ses plus grands romans, des trucs qui commencent par "Book One, Part One, Chapter One, Page One". Prometteur, non ? Et puis vous assisteriez à l'écrasante supériorité sportive de Patty sur Charlie Brown, Schroeder, Lucy et Linus.

C'est ici aussi que se trouve une série de strips que j'avais déjà lus dans la langue de Molière (décidément, c'est presque un billet sur le théâtre) : Linus vient annoncer à Charlie Brown qu'il ne pourra plus réaliser ses propres bonshommes de neige désormais. Les adultes ont créé une ligue. Entraînement le lundi et le jeudi, trophées, assurance tous risques, championnat, arbitrage sévère sont au programme des réjouissances. En découlent de profondes interrogations de la part d'un Charlie Brown hagard qui, du fond de son lit, angoissé et insomniaque, en vient à douter que les adultes aient jamais contribué à rendre notre vie sur Terre plus excitante.

Vous pourriez lire tout ça si vous aviez ce tome entre les mains. Mais vous ne l'avez pas. Parce que vous ne passez pas des heures à chercher les cacahuètes rares sur eBay, et que vous n'avez pas les moyens de payer le prix fort sur Ch..tre.com. Et je vous comprends. Alors cliquez simplement sur "Faire un don" et c'est promis : la prochaine fois qu'on se voit je vous le prête.


120 pages env., éd. Holt, Rinehart and Winston (1973) - 4 $

(BD) We all have our hang-ups