11 avril 2011

Des nouvelles d'Alain


Après le succès mérité de la trilogie Le Photographe, Emmanuel GUIBERT reprend le concept de mélange dessin/photos pour cet album édité par Les Arènes - XXI. Didier Lefèvre est mort depuis, et les photos sont ici signées d'Alain KELER, lauréat du prix Eugène Smith en 1997. Le thème de ce recueil : les Roms, où qu'ils soient en Europe.


Les photos récoltées ici sont pour la plupart en noir et blanc et en feuilletant les pages, j'ai retrouvé instantanément le souvenir du Photographe, que j'ai relu il n'y a que quelques semaines de cela d'ailleurs. Le dessin de Guibert est toujours aussi reconnaissable, dans l'épure avec de larges aplats de couleurs pâles, le texte encadré sur fond jaune clair. Les couleurs et la mise en page sont de Frédéric LEMERCIER. Photos et dessins alternent sur le même principe, mais c'est Alain Keler qui mène le récit.

Que raconte-t-il ? Dix ans de rencontres avec des Roms de Slovaquie, de République tchèque, d'Italie ou de Montreuil... Ses premiers contacts se font justement alors qu'il est au Kosovo aux côtés de Didier Lefèvre. Ils se poursuivent ensuite, comme une évidence. Alain Keler tisse pudiquement le lien qui l'unit aux Roms. Il se souvient que ses grands-parents et sa tante sont morts à Auschwitz, et ne dissocie pas le sort des Juifs de celui des Roms : « Les Roms, c'est le premier verrou démocratique qui saute. »

Ces récits courts composent un recueil engagé, suivi d'un épilogue de l'auteur qui ne l'est pas moins. A deux mois de l'été et après l'acharnement politique et policier de l'été 2010, la question des Roms et des Gens du voyage est brûlante. Ce livre permet de poser les orientations françaises dans un contexte européen. Il livre un état des lieux et propose des perspectives pour approfondir la question : associations présentes sur le terrain, sites web, livres, disques, films et spectacle.

Je me souviens avoir entendu il y a quelques temps à la radio un intervenant expliquer que dans je ne sais quelle région du monde, un peuple considérait comme l'Autre non pas celui qui lui était le plus opposé, mais celui qui lui était le plus proche. Après ma propre expérience auprès des Gens du voyage l'été dernier, je suis convaincu que les Roms sont notre Autre très proche, notre presque nous-mêmes. Les malmener, c'est comme le dit Alain Keler filer un sacré mauvais coton.


93 pages, éd. Les Arènes XXI - 19 €

1 commentaire:

Nicolas a dit…

Quelques pistes proposées par Alain Keler :
Jan Yoors, Tsiganes chez Phébus
Alexandre Romanès, Paroles perdues chez Gallimard
Joann Sfar, Klezmer chez Gallimard
Kkrist Mirror, Tsiganes et Gitans chez Emmanuel Proust
Taraf de Haïdouks chez Crammed discs
Gitans de Titi Robin chez Naïve
Les films d'Emir Kusturica et Tony Gatlif
et puis http://www.myspace.com/kesajtchave